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Copropriété : action en garantie contre l’assureur et une société de travaux en liquidation

Dans son arrêt du 27 février 2020, la troisième chambre civile de la Cour de cassation valide l’action en garantie diligentée par le syndicat des copropriétaires à l’encontre de l’assureur de la copropriété et d’une société de travaux en liquidation (Cass. 3e civ., 27 févr. 2020, n° 19-10.887, FS-P+B+I : JurisData n° 2020-002477).

Le litige oppose le propriétaire de deux appartements au syndicat des copropriétaires qu’il a assigné en paiement de dommages-intérêts. Celui-ci se plaignait d’infiltrations provenant du toit-terrasse, sous lequel était situé son lot.

Le syndicat des copropriétaires a diligenté une action en garantie à l’encontre, d’une part, de son assureur, la société Ace european group limited, aux droits de laquelle se trouve la société Chubb european group limited, et d’autre part, la société Alpes étanchéité isolation qui a effectué les travaux d’isolation, laquelle a été placée en liquidation judiciaire en cours d’instance.

Par son arrêt du 27 février 2020, la Cour de cassation apporte les deux solutions suivantes.

1) L’autorisation de l’assemblée générale (AG) des copropriétaires n’est pas obligatoire pour le syndic qui est défendeur à l’instance

Le syndicat des copropriétaires a fait grief à l’arrêt de la Cour d’appel de déclarer irrecevable sa demande dirigée contre la société Chubb european group limited, alors que, selon lui, le syndic n’a pas à être autorisé par l’AG des copropriétaires pour défendre à l’action introduite à l’encontre du syndicat et former une demande en garantie.

Selon l’article 55 du décret du 17 mars 1967 portant règlement d’administration publique pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis (D. n° 67-223, 17 mars 1967 : JO 22 mars 1967, p. 2742), le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par l’assemblée générale.

Se fondant sur cet article, la Cour d’appel a constaté que l’assemblée générale des copropriétaires n’avait pas habilité le syndic à agir contre l’assureur de la copropriété (CA Chambéry, ch. civ., 1re section, 20 nov. 2018, n° 16/02634). Elle confirma ainsi le jugement qui a décidé que le syndicat des copropriétaires est irrecevable à agir contre la société Chubb european group limited (TGI Chambery, 3 nov. 2016, n° 13/00921).

Après avoir rappelé sa jurisprudence selon laquelle le syndic pouvait, dans une instance dans laquelle il était défendeur, appeler en garantie un coresponsable pour dégager la responsabilité du syndicat des copropriétaires (Cass. 3e civ., 7 janv. 1981, n° 79-12.508 ; Cass. 3e civ., 30 nov. 2004, n° 00-20.453), la troisième chambre civile précise que « le syndic n’a pas à être autorisé par l’assemblée générale des copropriétaires pour défendre à l’action introduite à l’encontre du syndicat et former une demande en garantie contre l’assureur de la copropriété » (Cass. 3e civ., 27 févr. 2020, n° 19-10.887, § 12).

En statuant comme elle l’a fait, la Cour d’appel a violé l’article 55 du décret de 1967.

Les dispositions de cet article ont été modifiées par le décret du 27 juin 2019 portant diverses mesures relatives au fonctionnement des copropriétés et à l’accès des huissiers de justice aux parties communes d›immeubles (D. n° 2019-650, 27 juin 2019 : JO 28 juin 2019, texte n° 5 ; JCP N 2019, act. 601 ; J. Coronat, L’absence d’autorisation du syndic à agir en justice n’est plus invocable par les défendeurs : JCP G 2019, 762 ; A. Lebatteux, Étude sur les trois décrets parus en application des dispositions de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 dite ÉLAN en matière de copropriété : Loyers et copr. 2019, étude 5 ; S. Maouche, Publication du décret portant diverses mesures relatives au fonctionnement des copropriétés et à l’accès des huissiers de justice aux parties communes d’immeubles : Dossiers Lexis360 Avocat, Entreprises et Étudiant, 29 juill. 2019). Celui-ci précise désormais que « seuls les copropriétaires peuvent se prévaloir de l’absence d’autorisation du syndic à agir en justice » (D. n° 67-223, 17 mars 1967, art. 55, al. 2 , modif. par D. n° 2019-650, 27 juin 2019, art. 12).

2) La demande en garantie dirigée contre une personne morale placée en liquidation judiciaire est recevable

Les juges du fond ont rejeté les demandes du syndicat des copropriétaires, pour qui l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire n’a pas pour effet de faire échapper une personne morale à une action en garantie à son encontre.

La Cour de cassation n’est pas du même avis que les juges du fond, elle casse l’arrêt du juge chambérien au visa des articles L. 621-21, L. 622-22 et L. 641-3 du Code de commerce, en ces termes :

« Il résulte de ces textes que, dès l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, les instances en cours sont interrompues jusqu›à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance et qu›elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l’administrateur dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation de créances et à la fixation de leur montant.

Après avoir retenu qu’en raison de la liquidation judiciaire dont la société Alpes étanchéité isolation fait l’objet, aucune condamnation ne peut intervenir à son encontre, l’arrêt déclare la demande irrecevable.

En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés » (Cass. 3e civ., 27 févr. 2020, n° 19-10.887, § 5 à 7).

L’arrêt du 20 novembre 2018 est cassé et annulé, en ce qu’il rejette l’action du syndicat des copropriétaires à l’encontre de la société de travaux et déclare irrecevable son action contre la l’assureur de la copropriété. L’affaire et les parties sont renvoyées devant la Cour d’appel de Lyon.

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