Coronavirus : les entreprises dont l’activité est affectée peuvent bénéficier de mesures de report et / ou d’échelonnement des loyers et factures
L’ordonnance n° 2020-316 du 25 mars 2020 , ainsi que d’autres textes publiés dans la foulée, dressent toute une série de mesures concernant le paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité relatives aux locaux professionnels des entreprises dont l’activité est affectée par la pandémie de coronavirus. Le présent dossier d’actualité est à jour à la date du 20 avril 2020.
Les différents textes qui seront abordés ci-après ont la particularité de se juxtaposer et de renvoyer les uns aux autres, ce qui n’en facilite pas la lecture. En vue d’aider certaines entreprises à faire face à la pandémie de coronavirus (covid-19), certaines facilités liées au règlement des loyers et factures sont mises en place (1), celles-ci sont toutefois soumises à plusieurs critères (2).
L’ordonnance du 25 mars 2020 relative au paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité afférents aux locaux professionnels des entreprises dont l’activité est affectée par la propagation de l’épidémie de covid-19 (Ord. n° 2020-316, 25 mars 2020 : JO 26 mars 2020, texte n° 37 ; Ph. Billet, Les loyers et l›accès aux fluides sous le régime de la loi d›urgence sanitaire : JCP A 2020, 2097 ; JCP E 2020, act. 237 ; JCP N 2020, act. 343) est prise sur le fondement de l’habilitation donnée au gouvernement par la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 (L. n° 2020-290, 23 mars 2020 : JO 24 mars 2020, texte n° 2, art. 11 ; J.-F. Dreuille, État d’urgence sanitaire : Dr. pén. 2020, comm. 78 ; Act. proc. coll. 2020, n° 8, alerte 104 ; Act . proc. coll. 2020, n° 7, alerte 88).
Cette ordonnance donne la liste des entreprises susceptibles de bénéficier du report et / ou de l’échelonnement du paiement des loyers et factures. Il s’agit des personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique et résidant fiscalement, en France (D. n° 2020-378, 31 mars 2020 : JO 1er avr. 2020, texte n° 26, art. 1er), qui sont susceptibles de bénéficier du fonds de solidarité qui sera évoqué un peu plus loin. Celles qui font l’objet d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire peuvent également en bénéficier, sous réserve de fournir une attestation de l’un des mandataires de justice (Ord. n° 2020-316, 25 mars 2020, art. 1er).
1) Mesures de report et/ou d’échelonnement des loyers et factures
A) Report du paiement des loyers :
Cette mesure concerne les loyers et charges locatives dont l’échéance de paiement intervient entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire. Il est prévu que les entreprises qui ne payent pas leurs loyers et charges « ne peuvent encourir de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, d’astreinte, d’exécution de clause résolutoire, de clause pénale ou de toute clause prévoyant une déchéance, ou d’activation des garanties ou cautions » (Ord. n° 2020-316, 25 mars 2020, art. 4).
B) Report et échelonnement du paiement des factures :
— À compter du 26 mars 2020 et jusqu’à la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire, le paiement des factures peut être reporté pour les personnes susmentionnées, les fournisseurs ne peuvent procéder à « la suspension, à l’interruption ou à la réduction, y compris par résiliation de contrat, de la fourniture d’électricité, de gaz ou d’eau » (Ord. n° 2020-316, 25 mars 2020, art. 2).
— les factures exigibles entre le 12 mars 2020 et la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire peuvent être échelonnées à la demande des entreprises, et ce, sans aucune pénalité. Le paiement des échéances ainsi reportées est réparti de manière égale sur les échéances de paiement des factures postérieures au dernier jour du mois suivant la date de fin de l’état d’urgence sanitaire, sur une durée ne pouvant être inférieure à six mois (Ord. n° 2020-316, 25 mars 2020, art. 3).
2) Conditions d’obtention
Pour bénéficier des mesures précitées, ces entreprises doivent être susceptibles de bénéficier du fonds de solidarité institué par l’ordonnance du 25 mars 2020(Ord. n° 2020-317, 25 mars 2020 : JO 26 mars 2020, texte n° 39 ; A. Raynaldy, La création d’un fonds de solidarité : une participation financière de l’État et des régions auprès des entreprises dont l’activité est impactée par l’épidémie du Covid-19 : JCP A 2020, 2091 ; Ph. Billet, Retour sur le fonds de solidarité en faveur des très petites entreprises : JCP A 2020, 2120). C’est ce que précise l’ordonnance n° 2020-316 du 25 mars 2020, à son article premier.
Il faut ensuite se référer à son décret d’application du 31 mars 2020 (D. n° 2020-378, 31 mars 2020), dont l’article 1er renvoie à un autre décret du 30 mars 2020 (D. n° 2020-371, 30 mars 2020 : JO 31 mars 2020, texte n° 29 ; JCP G 2020, 419 ; D.O Actualité avr. 2020, n° 14, 15).
Le décret du 30 mars 2020 , dans sa version en vigueur jusqu’au 16 avril 2020, dresse une liste des conditions d’obtention du fonds de solidarité (D. n° 2020-371, 30 mars 2020, art. 1er, al. 1er, 1° à 9° et art. 2), dont il fallait alors extraire celles spécifiques à l’obtention des report et échelonnement des loyers et factures (D. n° 2020-371, 30 mars 2020, art. 1er, al. 1er, 1° et 3° à 8° ; art. 2, 1° et 2°).
A) Seuils d’effectifs et de chiffre d’affaires (D. n° 2020-371, 30 mars 2020, art. 1er)
Les entreprises devaient remplir les conditions suivantes (D. n° 2020-371, 30 mars 2020, art. 1er, al. 1er, 1° et 3° à 8°, dans sa version en vigueur jusqu’au 16 avril 2020 et dans l’ordre) :
– avoir débuté leur activité avant le 1er février 2020 ;
– avoir un effectif inférieur ou égal à dix salariés (CSS, art. L. 130-1, I) ;
– leur chiffre d’affaires (CA) doit être inférieur à un million d’euros ;
– leur bénéfice imposable ne doit pas excéder 60 000 euros au titre du dernier exercice clos ;
– les dirigeants majoritaires ne doivent pas être titulaires, au 1er mars 2020, d’un contrat de travail à temps complet ou d’une pension de vieillesse et n’ont pas bénéficié, au cours de la période comprise entre le 1er mars 2020 et le 31 mars 2020, d’indemnités journalières de sécurité sociale d’un montant supérieur à 800 euros ;
– ne pas être contrôlées par une société commerciale (C. com., art. L. 233-3) ;
– lorsqu’elles détiennent une plusieurs filiales, la somme des salariés, des chiffres d’affaires et des bénéfices des entités liées respectent les seuils précités liés à l’effectif salarial, au CA et au bénéfice imposable.
Le décret n° 2020-371 a été modifié par un décret du 16 avril 2020 (D. n° 2020-433, 16 avr. 2020 : JO 17 avr. 2020, texte n° 33). Désormais, les trois premières et l’avant dernière conditions précitées subsistent, les autres ayant été abrogées. Le décret 2020-378 qui renvoie aux 1° et 3° à 8° de l’alinéa premier de l’article premier du décret n° 2020-371 n’a, pour l’heure, pas été modifié.
B) Difficultés subies du fait de la crise sanitaire (D. n° 2020-371, 30 mars 2020, art. 2)
Au moment de la pandémie, les entreprises concernées rencontrent les difficultés suivantes (D. n° 2020-371, 30 mars 2020, art. 2, 1° et 2°, dans sa version en vigueur jusqu’au 16 avril 2020) :
– avoir fait l’objet d’une interdiction d’accueil du public intervenue entre le 1er mars 2020 et le 31 mars 2020 ;
– avoir subi une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % durant la période comprise entre le 1er mars 2020 et le 31 mars 2020. Ce seuil s’élevait initialement à 70 % et a été abaissé à 50 % par un décret du 2 avril 2020 (D. n° 2020-394, 2 avr. 2020 : JO 3 avr. 2020, texte n° 10, art. 2 ; JCP S 2020, act. 143).
Même remarque que pour les seuils d’effectifs et de chiffres d’affaires, l’article 2 du décret n° 2020-371 a été modifié par le décret n° 2020-433 du 16 avril 2020 , qui l’a enrichi de trois conditions supplémentaires, mais le décret 2020-378 qui renvoie aux 1° et 2° de l’article 2 du décret n° 2020-371 n’a pas été modifié.
La liste des conditions pour bénéficier de ce dispositif est susceptible d’évoluer à nouveau.